Tout avait vraiment commencé à cause de ton père et de ta mère. Ces derniers n'étaient jamais d'accord sur quoi que ce soit, et cela menait généralement à une petite dispute, qui refroidissait l'ambiance. Tu demandais alors toujours pour sortir de table, ou aller t'acheter quelques sucreries pour éviter de devoir supporter cela. Tu n'as jamais aimé les cris et les pleurs. Même bébé, les docteurs étaient ébahis de voir que tu pleurais moins souvent que d'autres, uniquement lorsque tu avais faim, ou que tu avais envie de dormir. A ce moment-là, tu savais pertinemment que tu fuyais la réalité, que la situation n'allait pas s'arranger comme ça, en s'éclipsant de la sorte. Mais tu étais trop jeune et insouciant pour t'en préoccuper. Et puis, il y eut cette grande bataille entre tes parents, qui t'a énormément marqué dans ton adolescence. Ta mère voulait que tu fasse des études longues, pour être sûr d'avoir les bagages nécessaires pour un bon travail. Ton père, lui, disait qu'il fallait travailler tout de suite maintenant, car la crise était passée et l'emploi était au meilleur de sa forme. Tu as attendu plutôt longtemps, à te triturer les méninges sur quoi faire. Quoi qu'il en soit, au fin fond de ton esprit, ta décision était déjà prise. Tu n'avais jamais vraiment aimé les études, après tout. Ce qu'il t'enseignait, soit tu le savais déjà, soit tu l'apprenais plus tard, et ça te frustrait, parce que tu avais l'impression de perdre ton temps et de tourner en rond. Tu as donc choisi la voie du travail, en assumant les conséquences d'une telle décision. Ton père fut fier de toi, mais ta mère ne supporta pas une telle traîtrise de ta part. Alors elle accusa ton père de t'avoir convaincu de faire une telle chose, et divorça. Un divorce, on a beau dire que ce n'est pas grand-chose, c'est tout de même triste. Et puis, lentement, tu commença à regretter les câlins de ta mère, les petits déjeuners chaud le matin. Tu restas vivre avec ton père, car même si ta mère disait que tu étais toujours le bienvenu chez elle, tu savais que c'était faux. Tu sentais l'hypocrisie dans sa voix, et tu comprit pourquoi en l’apercevant avec un autre homme. Tout ce qui pouvait lui rappeler son ancienne vie n'était pas le bienvenu non. Ton père se fit aussi de nouvelles connaissances, et les femmes défilèrent bientôt dans la maison familiale. Que tu désertais de plus en plus souvent, pour dormir chez des amis. Tu en avais marre, finalement. Marre de ce manège. Tu te trouvas un petit travail bien payé comme serveur dans un café. Ce n'était pas glorieux, mais comme disait si bien ton père, c'est largement suffisant pour démarrer. Les histoires de zombies ne t'échappèrent pas, bien sûr, mais elles ne t'intéressèrent pas. Tu ne croyais pas à ce genre de choses, c'était tout bonnement impossible. Ce n'est pas un film, c'est la vraie vie. Voilà ce que tu rêvais de crier à ces commères qui effrayaient la clientèle du café avec leurs histoires inventées. Une fois de plus, tu t'enfuis de la réalité, en fermant les yeux sur les événements étranges qui arrivent en ville ces derniers temps. Sans oublier de mentionner Huang Zhen. Ce garçon qui se fait toujours battre presque à mort, et que tu récupère toujours derrière le café. Tu as beau lui faire la morale tous les soirs, ça rentre dans l'oreille d'un sourd : tu sais qu'il sera encore là demain. Heureusement, tu as des amis comme Dae Jung, de ceux qui ont un cœur d'or et qui valent la peine de se démener un peu, de s'ouvrir et de parler. Pas trop tout de même, sinon, c'est le patron qui parle plus que d'habitude. Et...Min Hun. Cela fait déjà plusieurs mois que tu le fréquente, et tu as le sentiment de le connaitre depuis toujours. Est-ce parce que vous vous ressemblez physiquement? Non, il y a quelque chose de plus. Autant dire que ça te perturbe, ce tiraillement de boyaux que tu ressens à chaque fois que tu pose les yeux sur son sourire chaleureux, sur ses yeux rieurs. Il illumine tes journées, et tu sais qu'il est devenu bien plus qu'un ami désormais. Mais tu reste dans la notion de skinny love : tu lui montre ton affection par des gestes tendres, sans trop en faire, sans te dévoiler entièrement. Tu fuis la réalité, encore. Mais tu sais que cette fois, ce sera différent avec lui.